Le chant plastique : performances



Le chant plastique est une notion que l’artiste développe dans son essai « Expressions du corps interne. La voix, la performance et le chant plastique ». Il désigne une production vocale expérimentale située entre le chant et le cri, en dehors des mots, qui permettrait le temps de la performance d’exprimer « le corps interne », un corps pulsionnel et obscur. Cette pratique expérimentale tente de relier différents domaines, tels que le chant lyrique, le rock, le chamanisme, l’animalité et le burlesque.
Lien : Expressions du corps interne. La voix, la performance et le chant plastique. L’Harmattan, 2011.
Critique d’art n° 39. Note bibliographique 090. Printemps 2012
« A partir du propos de sa thèse, l’artiste Hélène Singer publie un essai sur le rôle et le pouvoir qu’exerce l’oralité dans la performance. Elle compile ici les différentes fonctions de la voix dans le champ des arts visuels en s’appuyant sur l’histoire de l’art et en revenant librement sur sa pratique personnelle. L’auteure cherche surtout à expliquer les formes du dépassement physique par le chant, la parole, ou le cri, mais aussi par leurs corollaires, l’inaudible ou le silence. » B. S.

LE CRI DE L’ÂNE
2’44, 2001. Vidéo-performance
Entre parodie des concerts punk et simulation de transe chamanique, l’artiste, sous un éclairage rouge hallucinatoire, enchaîne des séquences de cris extrêmes a capella.

LE CRI DU CŒUR
3’40, 2001. Vidéo-performance
Le titre de cette performance vocale prend l’expression « le cri du cœur » à la lettre : le spectateur voit à l’écran un cœur géant en train de crier. Cette vision saugrenue d’un organe qui crie est une redondance voulue, un clin d’œil au monde du spectacle, celui des illusions.

LE CHEVAL D’ARTAUD
6’53, 2003. Vidéo-performance
La performance se base sur le poème d’Antonin Artaud «Tutuguri, Le rite du soleil noir », où il est question d’un « septième homme [qui] est un cheval ». L’artiste, déguisée en femme-cheval, reproduit vocalement, à l’aide d’une oreillette, l’interprétation qu’en a fait Maria Casarès, sans prononcer les mots : elle rend compte de la musicalité du texte lu. En bas de l’écran, le poème d’Artaud défile, tel un sous-titre, au rythme de cette récitation averbale. Emportée dans une action instinctive, elle produit ensuite des hennissements extrêmes.

PERFORMANCE EN 16 TABLEAUX
3’10, 2000. Le Pays où le ciel est toujours bleu, Orléans.
En plein vernissage, l’artiste se met à crier puis à produire une réaction vocale à chacun des 16 tableaux exposés. Ce commentaire non-verbal traduit un rapport premier à l’œuvre, qui échappe à tout travail critique.

TÉLÉ-COMMANDE
3’23 », 2003. Place de la Sorbonne
L’artiste, juchée sur une barre de tribunal à roulettes chante de manière déclamatoire un air d’opéra, où il est question d’erreur, de justice et de vengeance. Deux hommes sont aux commandes de cet ensemble motorisé : ils tirent sur des ficelles pour faire avancer ou reculer l’oratrice, telle une marionnette.

LE CHANT MAGNETIQUE. Parcours au Musée Paul Belmondo.
18’35’’, 2011. (filmée par Philippe Gibert)
Circulant seule dans le Musée Paul Belmondo, je touche certaines sculptures pour entrer en résonance avec elles – comme par magnétisme -, et ce contact m’inspire une improvisation vocale non articulée. Ce « chant magnétique », né au contact physique de la sculpture, vise à rendre compte de ce que l’œuvre dégage pour soi, de cette sensation première difficilement explicable.
AUTRE VIDEO-PERFORMANCE

FAIRE VRAI ET LAISSER DIRE (Comment expliquer l’Olympia à un lièvre naturalisé)
3’39’’, 2013. Couleur, son. Voix off : Frédéric Bourreau
Il s’agit d’une réinterprétation de la performance de Joseph Beuys Comment expliquer les tableaux à un lièvre mort ? (1965). Plan fixe de moi en « Olympia », un lièvre naturalisé à mes côtés (à la place du chat), en musique de fond « Badinerie » de J.S Bach. Dès que la voix d’un homme prononce en allemand la formule de Manet « Faire vrai et laisser dire » (« Mach was Wahres und lass die anderen reden ») j’expose au lièvre ma méthode pédagogique d’insertion picturale.
